Le loup était dans la bergerie (Une histoire d’inceste)

2 novembre 2018

Le loup était dans la bergerie (Une histoire d’inceste)

Ceci n’est pas une fiction, mais j’ai dû modifier les prénoms des personnages pour des raisons évidentes.

Il y a quelques jours, j’étais en train d’apprêter mes filles pour l’école lorsque j’ai entendu des éclats de voix. Mon petit frère se disputait avec l’un de ses meilleurs amis, Sébastien, le voisin d’en face. Je leur ai demandé ce qui se passait, croyant qu’il s’agissait comme d’habitude d’une querelle d’écoliers. Que non, cette fois-ci le sujet était trop grave, il était question d’inceste.

En fait,  mon petit frère était au courant qu’Eric, le petit frère de Sébastien âgé de 20 ans entretenait des rapports incestueux avec Ariel, sa petite sœur directe âgée de 17 ans.  Il n’a rien dit à son ami, arguant que ce n’était pas à lui de le faire. Mais Sébastien s’est senti trahi et a même accusé mon frère de cautionner leur comportement. S’il n’était pas tombé par hasard sur les protagonistes en pleine action, il n’aurait jamais rien su. En tant qu’aîné de la famille s’en voulait d’avoir été aussi aveugle. Il avait bien remarqué qu’au quartier comme à l’école, ces deux-là faisaient difficilement un pas l’un sans l’autre. Étrangement, ils n’étaient pas particulièrement complices, et Ariel ne semblait pas particulièrement friande de la présence de son frère. D’ailleurs lorsque Eric constatait qu’elle se rapprochait un peu trop d’un garçon, il entrait dans des colères noires et la frappait parfois. Quand ils sortaient faire la fête, il ne laissait personne d’autre danser avec elle. Sébastien laissait couler en se disant qu’Eric ne faisait que son travail de grand-frère, il protégeait sa petite sœur des prédateurs. Comment aurait-il pu se douter que le loup était dans la bergerie ?

C’est les larmes aux yeux qu’il s’est confié à moi. Il m’a raconté comment révolté et dégoûté par sa découverte, il a vite fait d’aller dénoncer les coupables auprès de sa mère. Et scandale, il s’avère qu’elle était au courant de tout et avait choisi de garder le silence pour éviter que l’affaire ne s’ébruite.  « J’ai des problèmes plus graves, je dois assurer votre survie » a-t-elle dit à son aîné impuissant. Je dois souligner qu’il s’agit d’une famille relativement démunie. Le père est un petit mécano sans ambition qui a eu la brillante idée d’être polygame. Je vous épargne les détails mais en gros  il ne subvient pas aux besoins de ses 2 femmes et de ses 8 enfants.  Ils partagent tous le même domicile de 3 chambres dans une concession familiale. Laquelle concession est également occupée par 2 frères du monsieur et leurs familles, faut dire qu’il y a de l’ambiance chez eux. Sébastien a ainsi appris au passage que presque tous les enfants de la concession étaient au courant des faits, et en avaient parlé à certains voisins, dont mon petit frère. Aujourd’hui il est en froid avec toutes ces personnes.

Voyant que ce n’est pas à la maison qu’il obtiendrait de l’aide, Sébastien a décidé de demander conseil aux adultes du voisinage. C’était sans compter la hargne de sa mère à étouffer l’affaire. Pour contrecarrer les plans de son dénonciateur/traître de fils, elle a décidé de répandre la rumeur selon laquelle celui-ci était sous l’influence du tramol (médicament à base de narcotiques) et pouvait donc difficilement distinguer la réalité de la fiction.

Comme je l’ai dit au début de mon propos, c’était un lundi matin, et quelle que fût l’ampleur de mon choc il fallait bien que j’aille déposer mes filles à l’école, donc Sébastien est retourné chez lui avec sa colère. Je suis rentrée à la maison environ 30 minutes plus tard. A peine étais-je entrée que sa maman a débarqué sous prétexte de ranger un récipient de je ne sais quoi dans notre congélateur. Le geste en lui-même n’est pas inhabituel, en bons voisins on se rend service. Sauf qu’en général c’est un de ses enfants qui fait ce genre de commission. J’ai compris qu’elle cherchait juste un prétexte pour me parler.

La voilà donc qui engage la conversation et commence à se justifier alors que je ne lui ai rien demandé : « vraiment ma fille tout ça est né d’un malentendu, ce n’est pas ce qu’on t’a raconté là. La vérité c’est que Sébastien est rentré du travail un jour et il a simplement vu Eric en pleine conversation avec Ariel alors que celle-ci s’épongeait au sortir bu bain (comme si ça c’est normal !). La porte de la chambre était ouverte, ils ne faisaient que parler, mais Sébastien l’a mal pris. Tu sais, mes sœurs et moi quand nous étions enfants on s’habillait devant nos frères sans souci, on était en famille, rien ne pouvait se passer ». Je l’écoutais ébahie en me disant intérieurement, mais si tu crois sincèrement que c’est un malentendu, pourquoi tu as pris la peine de venir jusque chez moi pour me le dire ? Pourquoi tu tiens à te justifier ? Et puis j’avoue que je ne comprenais pas son raisonnement. Une maman qui estime que des adolescents de sexe différent peuvent se pavaner tous nus les uns devant les autres! Est-ce moi qui suis trop prude? Cela se fait-il naturellement dans d’autres familles?

Ce qui m’a achevée c’est la suite de son film fantastique : « Je te dis que quand Sébastien est venu les dénoncer, même comme son frère et sa sœur m’ont donné leur version des faits,  j’ai d’abord directement pris une voiture pour le village. Je suis entrée dans plus de cinq maisons (de marabouts) et on m’a dit qu’il n’y avait rien de tel dans ma famille, je te jure. » Elle m’aurait giflée que je n’aurais pas été aussi stupéfaite et indignée. Non mais franchement, tu apprends que tes gamins se chevauchent et au lieu d’essayer de faire face au problème tu préfères aller chez des marabouts dans ton village ? WTF !!! J’avais la chair de poule et mes glandes lacrymales me démangeaient. J’en avais assez entendu. J’ai fait mine de gober son histoire, je lui ai donné 2 ou 3 conseils sans conviction et je l’ai subtilement invitée à partir.

Cette histoire me hante depuis et je ne sais pas trop quoi faire. Sébastien m’a assuré qu’il ferait tout son possible pour que le forfait ne se produise plus. Je suis certaine qu’il fera effectivement de son mieux. Malheureusement le mal est fait et il semble que les parents n’ont pas l’intention de faire quoi que ce soit.

Pendant ce temps-là ma tête grouille de questions. Comment Ariel vit-elle ces évènements ? A-t-elle quelqu’un à qui parler ? Que puis-je faire pour l’aider ? Était-elle consentante ? Franchement je ne pense pas, je crois plutôt qu’Eric lui mettait la pression d’une manière ou d’une autre. Mais ce n’est que mon avis. Et si elle était consentante, était-elle pleinement consciente des implications de ce choix de coucher avec son frère ? Avait-elle toutes les cartes en main ? Connaissait-elle la portée de cet acte ? Et si elle était tombée enceinte ? Son histoire a fait naître dans mon esprit une autre préoccupation d’ordre plus général : comment protéger toutes les filles petites ou grandes (et même des garçons) à travers le monde qui doivent subir des agressions perpétrées par les membres de leur famille, parfois dans l’indifférence des parents et de leurs proches ? Cette dernière question fera l’objet de mon prochain billet.

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Commentaires

Alina
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Yésus!!!! Les pauvres enfants: oui, enfants, car Eric lui-même en est encore un au fond. Même si c'est un enfant salaud. Comment en sont-ils arrivés là? Je pense que la colère de Sebastien envers ton frère est justifiée, même si je ne sais pas ce que j'aurais fait si j'avais été à la place de ce dernier. Qui veut être celui/celle par qui le scanadale arrive? Pour ce qui est de la maman, je reste sans voix. Comme on dit chez nous "Na zink di cover house".

Mariette Tchamda
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Effectivement ils ne sont que des enfants, abandonnés à eux-mêmes qui plus est. Une meilleure réaction des parents aurait pu leur laisser une chance de prendre conscience de leur acte et de rectifier le tir dans une certaine mesure. Malheureusement...

Patrick Ella
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Bonne prose même si la fiction est bien réelle et de plus en plus cela arrivera dans les familles car l'éducation est abandonnée par les parents qui ont d'autres préoccupations que leurs enfants.

Mariette Tchamda
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Triste mais vrai mon ami. Mais qu'est-ce qui peut bien être plus important que nos enfants?

Dominik Enama
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Eric est un sorcier, voleur reconnu par les adultes du quartier. il a même été maudit par un.

Mariette Tchamda
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loooooooooooool. Peace grand frère.

Jessie
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Histoire macabre et désolante. Je suis sans voix.

Mariette Tchamda
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Moi aussi j'étais sans voix au début, mais là j'ai juste envie de crier sur tous les toits pour éduquer les parents et les enfants.

Yawane Guidjim Battich
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Cette mère qui reste silencieuse face à ce type d'acte est à blâmer dans toute cette histoire. wandoshima.com

Mariette Tchamda
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On peut la blâmer, mais je crois que le plus productif serait de l'éduquer, d'éduquer toutes les mamans et toutes jeunes filles pour qu'elles soient armées face à ce type de situation.